L’accès de tous à un logement abordable est une préoccupation majeure pour la Caisse Régionale de Refinancement Hypothécaire de l’Union économique et monétaire ouest- africaine (CRRH – UEMOA). Dans cette dynamique, l’institution basée à Lomé vient de lancer, en partenariat avec BOAD Titrisation, une première opération de titrisation de prêts hypothécaires. Dans un entretien à nos confrères d’Ecofine, Mme Yedau Ogoundele, Directrice Générale de la CRRH-UEMOA, a levé un coin de voile sur cette initiative inédite portée par le programme ZAKA.
Pourquoi la CRRH-UEMOA a-t-elle choisi de soutenir une opération de titrisation de prêts hypothécaires ?
Madame Yedau Ogoundele : Parce qu’il nous faut innover pour élargir notre impact. Depuis sa création, la CRRH-UEMOA a permis à de nombreuses banques d’accroître leur capacité à octroyer des prêts hypothécaires via le refinancement. Mais aujourd’hui, nous franchissons une étape supplémentaire. La titrisation, à travers le programme ZAKA, offre un nouveau canal de mobilisation de ressources longues, essentiel pour répondre aux besoins croissants en logement abordable dans l’UEMOA.
Pouvez-vous nous en dire plus sur cette première opération et le rôle des partenaires impliqués ?
Cette première émission – intitulée ZAKA NSIA CI – repose sur la titrisation d’un portefeuille de prêts hypothécaires cédés par NSIA Banque Côte d’Ivoire. Le montant de l’opération s’élève à 10 milliards FCFA. BOAD Titrisation agit en tant qu’arrangeur et société de gestion, avec tout le savoir-faire qu’on lui connaît. De notre côté, la CRRH-UEMOA intervient en tant que sponsor de l’opération. Notre objectif est clair : initier une dynamique collective pour structurer des solutions pérennes de financement du logement.
Qu’apporte le programme ZAKA par rapport aux instruments existants ?
ZAKA est un Fonds Commun de Titrisation structuré en compartiments. Chaque compartiment est indépendant en termes de risque et de portefeuille, ce qui garantit la solidité de l’ensemble. L’ambition est d’accueillir, dans différents compartiments, plusieurs banques cédantes, permettant ainsi de mutualiser les coûts tout en maintenant une logique rigoureuse de gestion du risque. C’est une plateforme évolutive et inclusive. NSIA Banque Côte d’Ivoire est la première banque cédante à utiliser le programme ZAKA. Cette opération lui permet de réaliser trois objectifs principaux : lever de la liquidité pour financer son portefeuille de prêts hypothécaires et libérer des capacités d’octroyer de nouveaux prêts au logement, réduire ses besoins en fonds propres réglementaires.et partager le risque du portefeuille avec des investisseurs tiers.
Le nom “ZAKA” semble avoir une forte portée symbolique. Est-ce intentionnel ?
Absolument ! Le mot “ZAKA” évoque le foyer, la famille — des notions profondément ancrées dans nos sociétés. Ce programme vise à renforcer l’accès à un habitat digne, stable et inclusif. En d’autres termes, ZAKA n’est pas seulement une solution financière ; c’est un outil au service d’un objectif social. Nous croyons qu’il est possible — et nécessaire — d’allier innovation financière et impact humain.
NSIA Banque Côte d’Ivoire partage cette vision. Elle a été un acteur moteur de cette opération. Son engagement reflète une volonté de conjuguer performance financière et responsabilité sociale. Pour eux, comme pour nous, ce RMBS n’est pas une fin en soi, mais un point de départ pour structurer un marché régional profond, résilient et durable.
Et après “ZAKA NSIA CI” ? D’autres opérations sont-elles prévues ?
Oui, d’autres opérations sont en cours de structuration avec d’autres établissements bancaires. L’objectif est de déployer progressivement plusieurs compartiments du programme ZAKA dans l’ensemble de l’UEMOA. Nous voulons construire un marché dynamique de la titrisation dans la région, au service du logement.
En résumé, quel message souhaitez-vous adresser aux acteurs du secteur ?
Il est temps de « financer autrement » le logement. ZAKA démontre que, même dans un contexte sous-régional, des solutions innovantes sont possibles quand les acteurs unissent leurs forces. Nous appelons les banques, les investisseurs institutionnels et les autorités à se mobiliser. Ensemble, nous pouvons bâtir une finance plus inclusive, au service de tous.