(Nécessité de revoir la politique rizicole)
En 2024, le Bénin s’est classé parmi les cinq plus gros importateurs africains de riz en provenance de la Thaïlande, avec près de 287 000 tonnes achetées. Un chiffre élevé qui contraste avec son potentiel rizicole, notamment la vallée de l’Ouémé, deuxième plus riche du monde après celle du Nil.
S.T.
Avec 286 649 de tonnes importées en 2024, le Bénin figure dans le top 5 africain des pays importateurs de riz thaïlandais, derrière l’Afrique du Sud, le Sénégal, la Côte d’Ivoire et le Mozambique. Selon les données de l’Association nationale des exportateurs de la céréale (TREA), compilées par l’Agence Ecofin, le continent a absorbé 30 % du riz expédié par la Thaïlande, soit 3 millions de tonnes. Ce volume record représente une hausse de 23,3 % par rapport à l’année précédente. Ce qui illustre la pression croissante de la demande, malgré les efforts de certains pays pour améliorer leur autonomie alimentaire. Pour le Bénin, cette performance à l’importation soulève une double interrogation : la compétitivité du riz local face aux produits asiatiques, et la faiblesse des réponses déployées pour transformer le potentiel agricole reconnu en véritable levier économique. On en veut pour preuve, la vallée de l’Ouémé, une manne agricole largement sous exploitée. Classée deuxième après celle du Nil, cette zone dispose d’un écosystème unique, favorable à une riziculture intensive et durable. Pourtant, l’exploitation reste morcelée, peu mécanisée et sous-financée.
Les importations massives de riz, notamment d’Asie, traduisent l’absence d’un investissement structurant dans la chaîne de valeur rizicole locale. Au lieu de capitaliser sur son avantage naturel, le Bénin dépense chaque année des centaines de millions de dollars pour satisfaire sa consommation via des cargaisons extérieures, même s’il faut reconnaître qu’une bonne partie de ces commandes sont convoyées vers le géant Nigéria. L’écart est d’autant plus frappant que le riz thaïlandais, bien qu’importé à des prix supérieurs à ceux du riz indien (entre 95 et 97 dollars la tonne contre 78 à 80 dollars), reste préféré pour sa qualité. « Un industriel au Nigeria dit que si le riz étuvé thaïlandais était accessible, les Nigérians le choisiraient volontiers, car il est à grain long et de qualité premium », souligne Platts. Le Bénin, voisin du Nigeria et consommateur de riz à grande échelle, suit une logique similaire.
Des perspectives contrastées pour 2025

Le pic d’importation de 2024 pourrait ne pas se répéter. Sur les quatre premiers mois de 2025, les données montrent une baisse de 32 % des volumes importés par l’Afrique, avec des reculs notables au Bénin, en Angola, en Côte d’Ivoire et en RDC. Cette contraction est liée à une baisse de la demande, mais aussi à des arbitrages budgétaires imposés par la pression sur les devises et les réserves. Néanmoins, le riz thaïlandais retrouve en Afrique de l’Ouest un intérêt commercial, notamment grâce à une meilleure compétitivité face au riz indien. À 375 dollars la tonne FOB, contre 381 pour l’équivalent indien à 5 % de brisures, la Thaïlande reste bien placée. Une configuration qui pourrait maintenir une pression constante sur les producteurs locaux africains, à moins d’une réorientation forte des politiques agricoles nationales.
Le cas du Bénin, confronté à une dépendance vis-à-vis des importations et à une richesse naturelle sous-exploitée, reflète le déséquilibre structurel que connaissent de nombreux pays africains. En valorisant la vallée de l’Ouémé, le Bénin pourrait non seulement réduire ses importations, mais aussi émerger comme un pôle régional d’exportation.